La carte au trésor

Il était une fois, un homme qui habitait près de la mer. Il avait en grande estime un majestueux navire qu’il chérissait depuis toujours. Plus tout neuf, mais imposant et noble. Un jour sa petite fille lui rendit visite et demanda à aller le visiter. Ils prirent le chemin habituel vers la mer et montèrent à bord. Elle connaissait par cœur les moindres détails de ce vieux bateau. Elle adorait voir les immenses voiles danser dans le vent. Et par-dessus tout elle aimait l’odeur de la coque et ses pièces. Elle fouillait dans les tas de ferraille qui parsemaient les tables. Elle trouvait le plus souvent de vieux objets qu’elle avait le droit de rapporter chez elle. Ce jour-là, dans le support de plume d’un gros encrier, sculpté d’une étoile, elle aperçut un morceau de papier plié. Elle l’ouvrit et découvrit une carte. Elle indiquait une route ceinturée de différents noms de ports qu’elle ne connaissait pas. Tout en haut, on distinguait quatre petits cailloux dessinés à la main et l’on pouvait lire « Joyaux », juste au-dessus. Elle en était certaine, il s’agissait d’une carte au trésor. Elle en avait tant rêvé, découvrir un jour dans un parchemin, la route vers un trésor caché. Aujourd’hui elle tenait entre ses mains son rêve. Il lui fallait un bateau… et surtout son grand-père. Mais en découvrant cette folle histoire celui-ci ne put que réprimer sa fureur. Il ne pouvait risquer les deux choses les plus importantes pour lui au monde. Alors jour après jour, semaine après semaine la jeune fille tenta de le convaincre et lui exposa mille arguments. Elle tentait de lui exprimer à quel point ce voyage lui était destiné. Un soir, le coude apposé sur le rebord d’une fenêtre, le vieux monsieur réfléchissait à comment cet encrier était arrivé jusque dans son bateau, et depuis quand. Sans trouver de réponse il regardait les étoiles frémir dans le ciel, les vagues douces lécher les quelques rochers au loin. Et surtout son bateau, ressemblant dans la nuit à un vieil arbre. Il semblait avoir pris racine. C’est alors qu’il prit sa décision. Un bateau qui prend racine, ça n’existe pas. C’est contre nature. Il prit dans sa table de chevet une boussole dorée et l’apporta à sa petite fille. En voyant le regard de son grand-père, il ne fallut pas une seconde pour que la jeune fille comprenne que ce voyage allait se concrétiser. Quelques heures plus tard ils avaient préparé leurs sacs de nourriture, leurs vêtements et les objets essentiels à ce périple. Ils terminèrent de travailler sur leur itinéraire puis se dirigèrent vers la mer. Une fois à bord tout était prêt. Ils étaient tous deux certains qu’ils allaient vivre et partager une expérience unique, peu importe ce qu’ils trouveraient à la fin. Les premières heures furent mouvementées. Le temps fut très maussade. Et le vent était déchainé. Le grand-père avait autrefois navigué mais il était plutôt rouillé. Quant à la jeune fille, elle avait parcouru de nombreux livres de grands explorateurs et étudié beaucoup d’ouvrages sur la navigation, mais jamais elle n’avait dirigé un bateau de cette ampleur. Ils eurent ainsi à se former l’un l’autre. Ils s’entendaient à merveille. Bien qu’un seul désaccord fût porté sur la signification des quatre cailloux dessinés. Etaient-ce des ports, des rochers, des iles… ? Lorsqu’ils furent arrivés au bout de ce qu’ils savaient de leur itinéraire ils jetèrent l’encre. Et ils attendirent. La nuit était sombre et très nuageuse mais à l’horizon on pouvait voir encore des lueurs dorées. Ils s’assirent et regardèrent le ciel. La lune perça les nuages et soudain ils leur sembla voir une multitude de couleurs flamboyantes sur l’eau. Ou plutôt sous l’eau… car en s’avançant vers la rambarde ils virent l’eau briller de mille couleurs. Des milliers de pierres précieuses semblaient osciller sous l’eau, juste sous eux. C’est alors qu’ils cherchèrent les 4 points figurant sur la carte. Ils cherchèrent tout autour d’eux. Rien que de l’eau. De l’eau reflétant les étoiles… Les étoiles ! Ils levèrent les yeux et virent quatre grosses étoiles lumineuses juste au-dessus du navire. C’était la réponse ! C’est alors qu’il se souvint. L’encrier ! Il se souvenait de qui le lui avait donné. Ce souvenir s’était échappé de sa mémoire. Il s’agissait de la personne qui avait baptisé le bateau et écrit le nom sur la coque avant que celui-ci ne prenne la mer. Son cher père ! Ils arrivèrent à attraper une petite quantité de pierres précieuses avec leurs filets en plongeant à quelques mètres. Puis ils reprirent la route. Lentement, le navire porté par les vagues repartit vers l’horizon. La petite fille et son grand-père à son bord. Et entre deux claquements de vagues on pouvait lire le long de la paroi épaisse et solide : « Vivre » en lettres manuscrites.

Myriam Lumhy

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